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Azuchi : promenade en vélo au bord du lac Biwako

Azuchi : promenade en vélo au bord du lac Biwako

安土の自転車

19 Mars 2017

Azuchi

Je suis le seul à sortir du train à Azuchi, et je me rends compte très vite que je me suis rarement retrouvé dans un village aussi petit et reculé depuis que je suis au Japon. Une de mes colocataires qui a vécu à Osaka quelques années m'a parlé de cet endroit. Elle gardait un bon souvenir d'une après midi à faire du vélo au bord d'un lac. L'idée m'a tout de suite plu. Elle m'avait dit que je trouverai des vélos à louer devant la gare. Pour une fois je n'ai pas besoin de chercher, à peine ai-je mis un pas à Azuchi que je me retrouve en face de deux boutiques de location, étalant leurs nombreux vélos sur le trottoir.

Un couple de japonais assez âgés gèrent la boutique dans laquelle j'entre. Pour une fois on ne s'étonne pas que je parle japonais, et je suis heureux d'avoir suivi mes cours avec assiduité. Très gentiment, ils prennent le temps de répéter leurs phrases, un peu plus lentement, ils me montrent un plan, m'expliquant les différents circuits que je pourrai prendre avec mon vélo. Je remplis un formulaire, tout en japonais, et je repars avec mon vélo que je suis libre d'utiliser comme bon me semble pour les quatre heures à venir.

Avoir pu poser des questions, comprendre les réponses et les explications, répondre à d'autres questions, remplir un formulaire et régler tous les détails pour louer un vélo, entièrement en japonais me donne un sentiment de profonde satisfaction. Certes, il ne s'agit pas de comprendre un journal ou de prendre art à un débat complexe, mais deux mois et demie plus tôt, je pouvais à peine bafouiller et ma compréhension du japonais était dramatique. Et puis ça me change de Kyoto. Ce matin, la situation était surréaliste. Alors que je m’apprêtais à commander mon petit déjeuner, je pose une question en japonais, le serveur me répond dans un anglais à peine compréhensible, je lui réponds en japonais, il me répond à nouveau en anglais. Je n'aurai pas prononcé un mot en anglais, il ne m'aura pas adressé un mot de japonais. Kyoto me fatigue un petit peu. Trop de touristes, et les commerçants en ont pris l'habitude. Ici je me sens plus à ma place, l'impression de découvrir quelque chose de plus authentique.

Cela fait des années que je ne suis pas monté sur un vélo, mais l'adage se révèle exact, rien ne me semble plus naturel que de pédaler. Pour l'instant je suis en ville. Si j'ai bien compris le plan, je devrais bientôt me retrouver dans la nature. Mais je dois m'arrêter souvent, j'ai un problème : mon long manteau n'arrête pas de se coincer dans les roues de mon vélo et de me déséquilibrer.

Ce manteau, je l'ai trouvé à Tokyo, d'occasion, un manteau italien, noir, il m'arrive juste au dessus des chevilles. Des japonais, croisés par hasard, m'ont souvent fait des compliments sur mon manteau. Je n'aurais pas pu rêver mieux pour passer l'hiver à Tokyo. Je fais tout mon possible pour le faire rentrer dans le petit panier de mon vélo, avec mon sac ça tient à peine.

Très vite, la piste cyclable s'éloigne de la route. Je me retrouve seul, au milieux de la campagne japonaise. Des champs, beaucoup de champs. Entouré par quelques quelques collines boisées, le paysage défile en silence. Un lac, pas très grand, absolument désert. Il y a beaucoup de vent, pas la journée idéale pour une balade en vélo, mais j'aime ce sentiment de solitude et de liberté.

En poursuivant mon chemin j'aperçois quelques bateaux sur un canal. Je m'arrête un moment pour observer ces embarcations traditionnelles. Les petits bateaux avancent avec douceur, sans bruit, sur des eaux calmes. Je remarque alors une phrase écrite sur mon vélo, de l'anglais. Dans le seul endroit où il m'a fallut me débrouiller uniquement en japonais. L'ironie me fait sourire. "Anyone who goes outdoors gets closer to nature and is a better person because they've been there. by Sheldon Coleman Sr"

Il est encore tôt, je décide de tenter de m'approcher du lac Biwako. Un lac immense, le plus grand du Japon, j'aimerai le voir de près mais je ne sais pas si j'aurai le temps de l'atteindre. La piste cyclable s'éloigne du lac, s'enfonce dans les champs, et puis la piste cyclable devient un trottoir, les champs deviennent des routes, le calme de la nature est couvert par le bruit de la circulation. Mais je pédale, toujours, en direction de Biwako.

Le lac Biwako

Décidément, une journée sans me perdre, voilà qui est assez exceptionnel. J'ai suivi le plan et cette fois-ci ça a marché. Je pose mon vélo sur les berges du lac Biwako. Des bateaux partout, une avancée qui donne sur des eaux immenses, presque l'impression d'être dans un port en bord de mer. Si ce n'est ces montagnes qui nous entourent. Ici non plus, il n'y a personne. Ah... si. Deux femmes descendent des escaliers de pierre qui semblent s'enfoncer dans les montagnes.

Il me reste du temps avant de devoir rendre mon vélo, et le plan indique un temple dans les environs. Peut-être qu'il est là, en haut de ces escaliers. Je ne sais pas quoi faire de mon vélo. Après tout on est au Japon. Je le laisse près d'un arbre et m'élance avec entrain dans les escaliers.

Les escaliers... Des escaliers de pierre, aux marches bien trop hautes et irrégulières. Les escaliers... J'en ai déjà fait l'expérience au mont Takao. Je passe à côté dès que je peux, mes jambes souffrent, j'ai mal aux pieds.

Plus d'une fois je pense abandonner. Je n'aurais jamais cru que ces escaliers seraient aussi longs. C'est que je sais qu'il me faudra prendre ces mêmes escaliers pour redescendre et que ça n'est pas plus reposant que de les grimper. Mon grand manteau m'encombre, je n'ai pas voulu le laisser dans le panier de mon vélo. Mais je ne suis pas monté pour rien. C'est bien un temple qui se trouve tout au bout de ces escaliers. Un ensemble de bâtiments anciens offrant une vue magnifique sur le lac Biwako. Je suis bien le seul à avoir pris les escaliers pour venir ici, les gens arrivent par la route, de l'autre côté.

Je me repose un instant, profitant de la vue et jetant un coup d’œil aux grigris en tout genre vendus dans le temple. Des gens font la queue pour avoir une calligraphie faite avec soin par les moines. L'odeur de l'encens, en pleine nature, entouré par la forêt, m'emplit toujours de sérénité. Ça valait le coup, vraiment.

Deux heures que j'ai quitté Azuchi, il est donc temps de retrouver mon vélo et de faire le chemin dans l'autre sens. Je devrais arriver à Kyoto avec la nuit, juste à l'heure pour partir à la recherche d'une délicieuse spécialité pour le dîner.

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